En tant que PDG de Blizzard, Mike Morhaime souligne l'engagement de Blizzard envers StarCraft et sa communauté professionnelle prospère à chaque fois qu'un tournoi se créée. Durant l'automne, la communauté StarCraft semblait morose en pensant à son futur, et en pensant aux capacités de Blizzard pour l'améliorer. Depuis, le studio s'est repris et essaie de rassurer la communauté sur le fait que, non seulement Heart of the Swarm sera une très bonne extension, mais aussi que la firme entend et comprend les inquiétudes de la communauté. Avec Morhaime dans le public, ils pouvaient difficilement les louper.
Mike Morhaime de Blizzard sur Le futur de Starcraft 2 dans l'eSport (Traduction par DamCx - Source)
Rob Zacny : Quelle va être l'approche de Blizzard en ce qui concerne StarCraft 2 en 2013 – et plus particulièrement sur la scène eSport – qu'est-ce qui va changer ?
Mike Morhaime : Je n'ai pas d'annonce à faire. Je peux vous dire quelle sera notre philosophie générale. Nous passons actuellement beaucoup de temps à discuter avec nos partenaires afin de savoir comment faire pour améliorer l'eSport de StarCraft 2 l'année prochaine. Avec la sortie d'HotS l'année prochaine, le 12 mars, nous pensons qu'il s'agit d'une bonne façon d'améliorer les choses. Je pense que beaucoup de monde nous regardera : c'est une extension fantastique. Au vu de la manière dont la scène des tournois StarCraft 2 se développe, il y a des choses que nous pouvons faire pour aider à l'améliorer.Tout d'abord, il y a beaucoup de tournois – et les IPL en sont un très bon exemple – c'est un tournoi de très grande qualité, il s'y passe tellement de choses... mais je pense que, lorsque l'on suit un sport, il est nécessaire qu'il y ait des structures pour l'encadrer afin que tout ait un sens. Ce n'est pas possible d'avoir de grandes finales, de grands championnats toutes les semaines, tout le monde ne participe pas... qu'est-ce que cela signifie, qu'est-ce que cela apporte... Nous rencontrons tous les acteurs de la scène, et nous essayons de réfléchir à la façon dont nous pouvons améliorer les choses. Nous pensons que Blizzard est dans une position telle que nous devrions prendre un rôle de leader pour aider à accomplir cela. Nous souhaitons le faire avec tous nos très bons partenaires, qui font un travail de très grande qualité.
RZ : En ce qui concerne ce rôle de leader, quels sont vos points d'action ?
MM : Dans un premier temps, pouvoir annoncer un planning par avance, afin d'éviter, dans la mesure du possible, quelques conflits, comme nous avons déjà eu, où les meilleurs joueurs ne peuvent pas participer à certains tournois, pour lesquels les spectateurs attendaient ces joueurs, afin qu'une victoire dans un de ces tournois ait une signification forte.
RZ : Je voulais discuter un peu du développement de Heart of the Swarm. HotS fait l'objet d'une bêta incroyablement longue – quelle en est votre expérience – et est-ce que développer de cette façon joue sur le processus ?
MM : Nous devons penser au fait qu'il y a une scène pro – des gens jouent en ce moment même à Wings of Liberty – et il y a tout un écosystème autour de ça. Nous ne voulons pas développer des changements dans notre coin, pour ensuite les imposer à cet écosystème. Tu ne peux pas faire ça. Tu dois t'assurer que les changements que tu effectues – les joueurs et les pros – tous doivent avoir la possibilité de comprendre ces changements, et de s'adapter à ces changements. Nous devons aussi pouvoir tester ces changements, et voir s'il y a ou non des effets de bord indésirables qui peuvent affecter l'équilibrage. Je pense qu'il est nécessaire de les réaliser en public, en partenariat avec la communauté. Nous recevons de fantastiques retours d'expérience de la communauté et des pros.
RZ : La communauté est très anxieuse, en ce moment, sur le futur de StarCraft 2, et plus particulièrement depuis les dernières affirmations de Destiny sur Reddit. Un des problèmes qu'il a soulevés est que StarCraft 2 ne parle pas suffisamment aux joueurs occasionnels. Comment allez-vous faire pour augmenter les audiences avec Heart of the Swarm ?
MM : Il y a un certain nombre de fonctionnalités sur lesquelles nous travaillons actuellement – et sur lesquelles nous travaillions avant le post de Destiny. Nous voulons faire en sorte de rendre le jeu plus accessible aux joueurs qui ne sont pas prêts à se plonger dans une scène hautement compétitive. Beaucoup de gens sont intimidés, au moins au début, de jouer dans des parties classées. Les parties non classées sont un grand pas dans cette direction. Mais, même avant cela, beaucoup de joueurs n'ont pas fait la transition entre la campagne et le matchmaking – afin de jouer contre des personnes qu'ils ne connaissent pas.
Il y a une fonctionnalité intéressante que nous implémentons dans HotS. Il s'agit d'une zone d'entraînement dans laquelle il est possible de jouer contre l'ordinateur, et ce dernier vous donne des indications sur les choses à faire pour vous améliorer. La difficulté est grandissante. Quand vous avez terminé le programme d'entraînement, vous pouvez faire des parties non classées contre l'IA.
RZ : Cela ressemble aux vieux jeu d'échecs, ou le jeu est en fait votre tuteur.
MM : Je n'y ai jamais joué, mais cela y ressemble.
RZ : Il observe ce que vous faites et est capable d'identifier vos faiblesses dans votre jeu ?
MM : [Non.] C'est un peu plus scripté. Cela scripte quelques builds basiques pour t'assurer que tu ne construises pas au hasard. Cela te donne un build sain, pour pouvoir commencer avec. C'est fait dans le but que les gens se familiarisent avec l'arbre technologique – parce qu'il y a des différences entre l'arbre technologique entre la campagne et les parties multijoueurs.
Nous souhaitons aussi permettre de mettre en lumière des joueurs avec des grandes possibilités que la communauté a développées : comme Day[9] et comme Apollo.
RZ : Une chose qui semble délicate, dans HotS, et sur laquelle vous avez fait un très bon travail, est d'affiner le design des factions – et plus particulièrement avec les Zergs – la manière dont on les joue en multijoueurs – leur jeu a un caractère fort. Mais justement, cela semble délicat d'insérer de nouvelles unités dans une construction aussi serrée... Comment améliorez-vous quelque chose qui n'a pas forcément besoin de l'être ?
MM : Nous en avions déjà fait l'expérience dans le premier StarCraft. Je pense que le design du jeu était déjà assez proche des races. Quand nous regardions les évolutions de la métagame, nous nous apercevions de certaines choses, pour chaque race... certains écarts qui avaient besoin d'être réglés, et nous avions réalisé de nouvelles unités en fonction de cela. Je pense que l'équipe de développement procède de la même manière pour la création des nouvelles unités de Heart of the Swarm. Il y a encore du travail à réaliser. Ils n'ont pas encore figé les unités, mais la philosophie y est. Comment pouvons-nous faire pour transformer cela en une possibilité de faire de StarCraft un jeu encore meilleur et plus équilibré ?
RZ : Va-t-il y avoir une pression pour que toute la scène pro passe sur Heart of the Swarm ?
MM : Il y en aura un, mais je pense que cela va se faire naturellement. C'est par HotS que les gens seront concernés. La scène pro, bien entendu, migrera à un moment, et nous devrons travailler avec nos partenaires afin de définir quand sera ce moment.
RZ : Y a-t-il quelque chose d'autre que vous souhaitiez ajouter concernant Heart of the Swarm ?
MM : Nous avions commencé à concevoir StarCraft 2 pour être beaucoup de choses à la fois, et l'une de ces choses pour lesquelles nous passons énormément de temps était de faire en sorte que StarCraft 2 devienne un eSport. En faire quelque chose d'amusant à regarder. Je suis très content de la place qu'il a... mais nous ne sommes qu'au début de ce que nous pouvons faire pour pouvoir atteindre un public plus grand.
RZ : Vous avez dit que vous souhaitiez améliorer la valeur des tournois. Est-ce que cela signifie que vous souhaitez prendre une place plus active dans les tournois l'année prochaine ?
MM : Probablement pas. Nous laisserons le soin à nos partenaires de s'occuper de cela.
RZ : En ce qui concerne les problèmes d'intégrité des tournois – les reprises de parties à partir des replays – comment pensez-vous régler ça en 2013 ?
MM : En fait, vous venez d'y faire allusion : nous avons une nouvelle capacité qui permet de reprendre une partie à partir d'un replay. Donc, s'il y a n'importe quel problème, que ce soit une coupure réseau, un problème de carte graphique, cela n'a pas d'importance. Si la partie est interrompue pour n'importe quelle raison, vous pouvez reprendre la partie sur un nouveau matériel et la relancer. Heureusement, nous espérons ne pas avoir à l'utiliser, mais si nous avions à le faire, ce serait possible.
De plus, il y a quelques autres possibilités sympas, qui pourraient avoir encore plus d'impact que cette fonctionnalité, comme l'outil d'entraînement qui semble vraiment intéressant : il est possible de mettre en place des scénarios pour soi – ou si tu souhaites reprendre une partie pour essayer de voir comment, à partir de cette situation, tu jouerais contre l'ordinateur. Comme outil pour Apollo ou Day[9], ils pourraient faire tout un tas de choses.
L'autre truc sympa est que tu peux sélectionner une grosse partie pro, et la jouer toi-même comme partie multijoueurs. Nous pourrions repartir d'un moment ou les deux bases seraient construites jusqu'à un certain point... et il serait ensuite possible de relancer la partie pour essayer différentes stratégies et voir comment pouvoir contrer.
RZ : Vous voyez les plaintes constantes concernant l'équilibrage. Que telle unité ou telle stratégie est trop forte. Est-ce que c'est quelque chose que l'équipe craint ? Croyez-vous qu'il s'agit de choses qui se corrigent par elles-mêmes ?
MM : Beaucoup se corrigent par elles-mêmes. Nous l'avons vu pour beaucoup, ces deux dernières années, lorsque les Terrans étaient surpuissants. Ensuite, les Zergs gagnent et ce sont ceux qui sont désormais trop forts. Ensuite vient le tour des Protoss. Nous avons entendu, lors du Battle.net World Championship, que les gens venaient à ce tournoi et imaginaient que les Zergs allaient dominer, et à la fin, les Protoss étaient supérieurs aux autres races. Je crois que nous portons notre attention sur l'équilibrage du jeu quels que soient les niveaux de jeu, et que l'on fait en sorte que l'équilibrage soit bon... mais nous regardons de manière plus particulière le plus haut niveau de jeu. Nous ferons des ajustements ici et là – nous l'avons déjà fait par le passé et nous continuerons ainsi.
RZ : Quelque chose m'a frappé, lors des BWC. Durant les pauses, il y avait les cinématiques de la campagne. Cela m'a ramené dix ans en arrière, lorsque je jouais à StarCraft : Brood War, j'étais totalement obsédé par l'histoire. Dix ans après, je suis plus obsédé par la scène eSport, et je ne fais plus que du multijoueur. Durant cette période, je suis devenu quelqu'un de plus appliqué en terme de stratégie. Pensez-vous que l'histoire de StarCraft, son récit, soit une vraie priorité ?
MM : Les deux sont importants. Lorsque vous allez voir la campagne d'Heart of the Swarm, vous serez étonnés. Notre équipe cinématique nous a fait nous envoler. En termes de possibilité de refaire le jeu, sur la profondeur de l'histoire, le caractère du jeu, c'est vraiment génial pour ce lien avec l'univers du jeu. Mais la raison pour laquelle les gens joueront encore à ce jeu dans cinq ou six ans sera le multijoueur et l'eSport.
RZ : J'ai entendu beaucoup de personnes dire que, pour une viabilité à long terme de la scène professionnelle, les jeux devraient se diriger vers un modèle Free-To-Play. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?
MM : Je pense que, au vu de la valeur que l'on retire d'une copie, StarCraft 2 a plus de valeur que n'importe quel lieu de divertissement. Je veux dire, si vous l'achetiez durant un Cyber Lundi, c'était 50% de réduction, soit vingt dollars. Comparez cela au prix de vos soi-disant jeux Free-To-Play, vingt dollars et vous pouvez jouer quasiment indéfiniment. Alors je ne pense pas que le prix soit un réel problème.
RZ : Est-ce que c'est une source de frustration – lorsque la valeur de quelque chose est biaisée lorsque les gens pensent que c'est gratuit ?
MM : C'est un peu frustrant que cette question revienne sans cesse, alors que les calculs ne peuvent pas soutenir les suppositions derrière cet argument. Il y a beaucoup de gens qui ont acheté StarCraft et nos autres jeux, et ils en connaissent la valeur.