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Esport - Rainbow Six Siege : Entretien avec Fabian Hällsten

Esport - Rainbow Six Siege : Entretien avec Fabian Hällsten
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Pur produit du cercle arctique, le meilleur joueur du monde autoproclamé de la scène Rainbow Six - actuellement sur le banc de la structure G2 - se confie en toute simplicité. Les spécialistes du premier degré feraient mieux de s'écarter.

Esport - Rainbow Six Siege : Entretien avec Fabian Hällsten

Qu’est-ce que Fabian Hällsten serait devenu s’il n’était pas devenu un e-sportif reconnu ?
J’étudiais pour devenir professeur d’histoire et de sciences sociales. J’aurais principalement dû enseigner aux jeunes de 15-16 ans à 18-19 ans. Je n’ai fait que deux années d’études sur les cinq que compte mon cursus. La première moitié de ma troisième année a été en quelque sorte gâchée par le fait que j’ai joué à un jeu vidéo spécifique pendant beaucoup trop d’heures…

Ce pseudo, Fabian, on peut dire que tu ne t’es pas trop cassé la tête pour le trouver. Tu voulais rester dans quelque chose de sobre ?
Je n’ai jamais vraiment eu de pseudo qui ne soit pas lié à mon nom. À un point tel que je ne m’en suis jamais trop soucié. Quand je suis passé pro, à 22 ans, j’ai simplement utilisé mon nom Steam, qui était mon vrai nom, de sorte qu’il était facile de se rappeler à qui appartenait le compte. Il est assez difficile de se rappeler de qui est qui quand on a beaucoup d’amis, surtout quand les surnoms changent constamment… Le mien est facile, car je ne le change jamais et c’est mon vrai nom.

Quels métiers as-tu faits avant de te lancer dans l’e-sport ?
J’ai commencé à travailler tôt. À 14 ans, j’ai aidé à construire l’intérieur d’un magasin de sport. Un mois plus tard, à l’âge de 15 ans, j’ai commencé à travailler dans ce même magasin, car c’est la première fois qu’on est autorisé à travailler dans un magasin en Suède. Plus tard, j’ai aussi travaillé un peu dans une quincaillerie jusqu’à ce que je décide d’aller étudier.

Parle-moi un peu de ta Suède natale. Dans quel coin vis-tu ? Qu’est ce que ce coin a de particulier par rapport aux autres ?
Je viens de la région sauvage du Nord, nous chevauchons des rennes et jouons au football avec des ours polaires. J’habite juste au sud du cercle arctique, je suis habitué aux hivers à -35 degrés Celsius et au soleil qui ne se couche jamais pendant les étés. J’ai déménagé dans le Sud pour étudier, mais j’avais l’impression qu’il y avait trop de monde, alors j’y suis retourné. L’endroit d’où je viens est le plus bel endroit de la planète et je ne le changerais pour rien au monde.

Ce bout de terre nordique est l’un des pays dans le monde où l’on vit le plus heureux, à ce qu’il parait. Pourquoi ça, selon toi ?
Eh bien, puisque j’ai étudié les sciences sociales, la politique et l’histoire, nous pourrions l’approfondir… Mais pour y répondre simplement, deux choses : une réelle égalité des chances, une nature belle et propre.

Un endroit parfait pour… commencer à jouer à Rainbow Six Siege. Pourquoi t’es-tu lancé d’ailleurs la première fois sur le jeu ?
J’ai été dupé par la bande-annonce de l’E3 d’Ubisoft. Je voulais descendre en rappel de mon foutu hélicoptère sur le toit de la maison comme ils me l’avaient montré !

On imagine que la collection doit prendre beaucoup de place dans ta tête, mais quel a été ton plus beau moment jusqu’ici sur R6 ?
Le come-back lors du Six Invitational 2018. Revoir le dernier round me fait pleurer, à chaque fois.

Peu de gens le savent, mais tu as fait tes débuts dans une équipe appelée Fenix. Ou du moins, tu devais. Car l’équipe a été forfait sur l’ensemble de la Pro League Saison 2. Pourquoi ça ?
Nous nous sommes dissous à cause de trop de problèmes internes. Les gens ne voulaient pas jouer le jeu, nous n’avions pas assez de solutions pour les remplacer, ce qui m’a conduit à partir. Nous ne nous sommes jamais entraînés et je voulais être le meilleur.

Qu’est-ce que tes premiers pas chez Fenix t’ont apporté pour ensuite exploser du côté de Penta ?
Pas grand-chose, c’était un jeu différent à l’époque. Imaginez une époque où j’étais un bon Ash et Jäger main, les strats étaient de courir avec son arme et « ra-ta-ta-ta-ta-ta ».

Si tu devais transmettre le meilleur conseil à un joueur qui rêve de réussite sur R6, à propos de quelque chose que tu as appris durant ta carrière, ce serait quoi ?
Trouvez une équipe avec laquelle vous êtes heureux de jouer, tout en continuant à vous améliorer. Ne vous contentez pas de la médiocrité si vous voulez être le meilleur. Continuez à jouer et faites de votre mieux. Votre chance viendra si vous êtes assez bon.

On avait échangé à ce propos à l’époque, mais j’aimerais avoir ton avis maintenant, à froid : quels ont été les secrets de la réussite de Penta Sports ?
Je ne sais même pas. Nous vivions libres de toute charge dans la tête pour la plupart. Nous gagnions le jeu avant même de monter sur scène la plupart du temps. Bien sûr, nous avons joué un Rainbow Six décent, mais rien d’extraordinaire à mes yeux.

Pengu, ou toi. Qui est le meilleur joueur au monde ?
Comme je suis sur le banc, je ne peux plus l’être. Je ne suis que le meilleur joueur de Ranked. Il peut donc garder ce titre jusqu’à ce que je trouve une nouvelle équipe.

Rainbow Six Siege

Chez G2 et même avant chez Penta, vous avez souvent recruté les meilleurs espoirs du moment, très souvent finlandais (SHA77E, Kanto, Uuno, … ). Comment expliquer ce phénomène, ou plutôt cette politique de recrutement ?
La Finlande, c’est Win-land ! Mais non, rien à voir avec la nationalité en vrai. Nous avons choisi les joueurs que nous voulions dans notre équipe parce que nous voulions les meilleurs. Les temps étaient faciles à l’époque, il suffisait d’offrir une place à la personne que l’on voulait et on l’avait.

Comment expliquer la décadence de l’équipe qu’a été G2, championne du Six Major, de la Pro League et du Six Invitational, jusqu’à devenir une équipe qui n’y arrive plus ?
D’autres équipes se sont beaucoup améliorées alors que nous avons stagné, nous n’avons pas travaillé aussi dur que nous aurions dû. Nous n’étions pas satisfaits d’avoir des idées mitigées au sein de l’équipe sur la façon dont le jeu devait être joué. Aucune équipe ne peut être au sommet pour toujours, il était juste temps pour nous de quitter le sommet de la montagne.

Tu renvoies parfois une image un peu similaire à celle d’Ocelote, ton patron chez G2 Esports. Celle d’un gars qui n’hésite pas à enfreindre les codes de la communication. Avez-vous des visions similaires sur l’esport et la vie ?
Tout le monde est tellement tendu de nos jours… rien n’est fait pour s’amuser. Nous sommes tous des robots.

D’accord… Quelle est la situation ou l’échange le plus incroyable que tu as vécu avec lui ?
Je n’en ai pas eu beaucoup avec lui, mais c’est un type formidable. Le peu que nous nous sommes rencontrés et avons parlé : il vous fait sentir bienvenu et désiré. Le soutien qu’il apporte à ses équipes est incroyable. Je suis très heureux d’avoir travaillé avec lui et pour lui.

On a pu voir que tu aimes bien déconner avec un autre membre de G2 : kennyS, le célèbre joueur français de Counter-Strike…
Il a gâché un passage dans une vidéo de Red Bull que je devais faire. Je ne lui pardonnerai jamais, c’est mon ennemi juré, c’est mon plus grand rival.

Après avoir marqué l’histoire de Siege, après les départs de KS, de Joonas et Goga - vous formiez la meilleure équipe de tous les temps - tu as finalement été aussi écarté du roster de G2. Pourquoi ?
J’ai demandé à partir après notre élimination prématurée lors du Six Invitational 2020. Je n’étais pas content de l’environnement qui régnait. Je ne pense pas que le reste de l’équipe l’était non plus. Pour être honnête, il n’y a pas grand-chose d’autre à dire à ce sujet. Les deux parties sont probablement déçues de la tournure prise avec notre équipe, car nous savons que nous aurions pu faire beaucoup plus. Cependant, je suis très heureux d’avoir eu ce groupe de joueurs comme coéquipiers et ils sont mes amis pour la vie. Les choses que nous avons réalisées ne seront plus jamais égalées.

Rainbow Six Siege

Aujourd’hui tu es libre. J’imagine qu’avec ton CV et tes stats excellentes sur la dernière saison, les projets doivent t’être proposés à la pelle ?
Je fais actuellement partie de la plus grande organisation de la planète : la LFT. Nous essayons de nous qualifier pour la MEGA League la saison prochaine, c’est une ligue secrète pour les joueurs, au-dessus de l’European League.

Tu as tout remporté sur la scène, mené plusieurs joueurs et rosters jusqu’au sommet. Est-ce que la formation est un univers qui t’attire pour le jour où tu raccrocheras la souris ? Fabian en coach instructeur, ça parait plutôt sexy…
Je suis trop compétitif pour être entraîneur ! Je dois devenir beaucoup plus âgé avant de pouvoir arrêter de jouer. Même arrivé à ce stade, j’ai l’impression que je préfèrerais vivre une vie normale. Il n’y a pas de pause dans une carrière de joueur professionnel, j’aimerais bien en avoir une. Je vais voir ce qui se passe. Actuellement, l’entraînement est très loin de ce que j’aimerais faire maintenant.

On a parfois l’impression qu’il existe deux Fabian. D’un côté : un personnage très confiant, qui s’autoproclame meilleur joueur du monde et se met énormément en avant. Une sorte de Zlatan, ton compatriote. Et pourtant, hors caméra, tu sembles être une personnalité humble, un défenseur des droits des joueurs, et très sympathique. Comment expliques-tu cela ?
Ce ne sont pas deux personnalités différentes, c’est moi. Si je crois que nous sommes la meilleure équipe, je m’assurerai que vous le sachiez, je m’assurerai que tout le monde le sache. Je ne le dirai pas sans y croire. Sans le croire, nous ne serions pas là. J’aime les projecteurs. Le fait de les enlever au reste de votre équipe n’est pas toujours une chose égoïste à faire, mais parfois utile pour les autres. Ça place moins de pression sur eux. Quand une personne au hasard sur Twitter me contacte pour me parler du fait que ça l’agace de m’entendre répéter que je suis le meilleur, je ne me soucie pas de l’opinion de cette personne. Mais tout le monde n’est pas comme ça, certaines personnes prennent les choses qu’elles lisent à cœur. Et si je peux leur enlever cette pression [en la déviant sur moi], j’ai fait mon travail. Je ne vois aucune raison d’être humble sur scène. Je veux déchirer la concurrence et faire tout mon possible pour la mettre à la poubelle. Même si en dehors de la scène, nous sommes tous des gars normaux, bons pour jouer aux jeux vidéo. Mais là encore, j’aime aussi me moquer de l’idée que les gens se font de moi… Peut-être que je ne suis qu’un trou du [BIP] égocentrique, qui sait ?

Rainbow Six Siege

Tu as connu toutes les formes du circuit de la Pro League, et tous ses écosystèmes. Que penses-tu de la version mise en place par Ubisoft avec la régionalisation et la Phase 3 du programme de revenue sharing ?
Je pense que le nouveau système de revenue sharing est un grand pas vers l’avenir pour l’e-sport de Siege. Il aidera les plus petits à se développer et les incitera à investir dans l’écosystème que nous avons. Je suis heureux qu’ils aient fait cela et ils méritent de nombreux éloges pour cela.

D’ici combien de temps Rainbow Six Siege pourra-t-il atteindre le tier 1 selon toi ?
Les problèmes que nous avons avec Siege et le fait d’être un jeu T1 sont en fait très faciles à identifier, mais difficiles à résoudre. Siege est un jeu extrêmement complexe à comprendre. Il y a tellement de possibilités dans ce jeu que d’autres titres d’e-sports n’ont pas. Surtout pas les jeux FPS, comme CS:GO. Nous ne les battrons pas pour la simple raison que c’est si ridiculement facile à comprendre. Vous regardez deux rounds et vous comprenez que les terroristes attaquent et que les contre-terroristes défendent. Les attaquants essaient de poser la bombe sur A ou B - bien sûr nous aussi, mais ensuite vous avez un milliard de pas entre les deux -, CS:GO n’a pas une énorme complexité. Alors bien sûr, nous pouvons être un T1, mais je crois que des jeux faciles à comprendre nous devanceront toujours, et que nous ne pouvons rien y faire.

Un jour, on m’a murmuré une soirée officieuse organisée dans une chambre d’hôtel à la fin d’un tournoi. Ça parlait d’appel au standard de la réception, de stock de boissons et de grands éclats de rire. Peut-on en savoir plus sur cette affaire ?
Je ne me souviens pas. J’ai juste continué à acheter de la bière, c’était une bonne nuit, mais je ne m’en souviens pas. (Sourire)

Aux dernières nouvelles, tu étais en couple avec une francophone. Où en est ton apprentissage du français ? Quels mots ou expressions as-tu appris à manier ?
Oui : baguette.

Si tu avais l’opportunité, tout de suite, là, maintenant, de faire une équipe avec 4 autres joueurs. En oubliant les histoires de slot, de contrats et d’argent, quels seraient ces quatres mates ?
En oubliant l’argent ? J’ai besoin de 4 clones, donc ils peuvent coûter ce qu’ils veulent, je veux 5 copies de moi-même.

On peut facilement faire travailler des joueurs sur de nombreux aspects techniques et stratégiques du jeu, mais il est très difficile d’entraîner des Leads In Game. Tu es l’un des meilleurs au monde à exercer à ce poste. Quels en sont les éléments les plus importants ?
Le lead in game dans le jeu tel que nous le connaissons n’existe plus, à mon avis. Vous pouvez annoncer un plan de base, mais tous les autres doivent prendre leurs responsabilités et shotcall toutes les opportunités qu’ils voient. Les strats de marionnettes d’années deux et trois sont officiellement mortes.

Rainbow Six Siege

En France, on s’est beaucoup interrogé sur l’approche mentale des Rogue durant les LANs, eux qui ont beaucoup eu du mal dans ce domaine malgré leur niveau de jeu en online. Toi qui as gagné beaucoup de LANs, comment tu perçois cela ?
Je pense que c’est simple : les nerfs et la pression. Ils se mettent la pression, après avoir échoué tant de fois, que cela ne devient pas plus facile. C’est un fantôme qui les hante constamment. Personne d’autre qu’eux-mêmes ne peut le résoudre.

Es-tu d’accord sur le fait que le sport et ses athlètes ont énormément de choses à apporter aux joueurs d’e-sport ? Notamment sur les préparations aux compétitions ?
Je ne sais pas, je préfère prendre une grande gorgée de Red Bull et des bonbons, je suis un nerd après tout.

Pour finir, tu peux nous confirmer que Fabian et Rainbow Six, c’est loin d’être terminé ?
Je ne serai pas heureux tant que je n’aurai pas levé le marteau pour la troisième fois.

Rainbow Six Siege
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European League, Challenger League, championnats nationaux, studio de broadcast à Paris, partenariat avec Face It et Live Nation, et même l'étymologie du terme phénix : entrevue encombrante avec les créateurs du nouveau circuit compétitif européen de Rainbow Six Siege.

Crédits photos : Ubisoft

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Christopher Lima
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Chris « LuZi » Lima - Rédacteur esportif

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