Après des années d’attente, Hollow Knight: Silksong débarque enfin au prix de 19,99 €. Une bonne nouvelle pour les millions de joueurs qui espéraient ce moment, mais un sujet plus délicat pour une partie de l’industrie indépendante. Car si ce tarif paraît presque symbolique face aux standards des jeux triple A vendus entre 60 et 80 €, il ravive une question sensible : que vaut vraiment un jeu indépendant après des années de développement ?
Eurogamer a receuillis des témoignages et réactions de développeurs et éditeurs indépendants sur l’impact du prix de Silksong.
Le prix de Silksong réjouit les joueurs, mais inquiète les créateurs
L’annonce du tarif a immédiatement déclenché une vague de réactions enthousiastes sur les réseaux sociaux. Beaucoup considèrent que Silksong est proposé à un prix exceptionnellement bas pour un jeu de cette envergure. Certains fans affirment même vouloir acheter plusieurs exemplaires juste pour soutenir Team Cherry. Mais derrière cette excitation se cache une inquiétude grandissante. Pour des créateurs qui peinent déjà à équilibrer leurs budgets, ce prix plancher pourrait fixer une nouvelle norme irréaliste.
« Silksong devrait honnêtement coûter 40 dollars, et je ne plaisante pas », a déclaré le développeur RJ Lake (Unbeatable). « Cela aura des répercussions, et toutes ne seront pas positives. »
Cette crainte s’est traduite concrètement : certains studios, comme BastiArtGames avec Lone Fungus ou Toukana avec Star Birds, ont dû revoir leurs plans de sortie, voire leur stratégie tarifaire. Même un éditeur aguerri comme Devolver a préféré repousser la sortie de Baby Steps pour ne pas être éclipsé par Silksong.
Une question de perception et de stratégie
Au-delà du montant exact, Silksong illustre la difficulté qu’ont les indépendants à positionner leurs jeux sur un marché saturé. Un prix trop élevé peut décourager un public limité en moyens, tandis qu’un prix trop bas risque de banaliser des années de travail.
Mike Rose, fondateur de l’éditeur No More Robots, insiste sur ce dilemme :
« Les gens ont moins d'argent aujourd'hui et achètent moins de jeux, il faut donc se positionner de manière à être le jeu qu'ils achèteront lorsqu'ils auront de l'argent. »
Pour certains experts, Silksong est un cas à part, car Team Cherry bénéficie d’une notoriété mondiale et d’un succès colossal avec les 15 millions d’exemplaires vendus de Hollow Knight. Mais pour la majorité des indépendants, il est impossible de proposer un projet de plusieurs années au prix d’un billet de cinéma sans risquer de mettre en péril leur rentabilité.
Pour Damian Martin, créateur de Citizen Sleeper 1 et 2 : « Quelle que soit l'importance de Silksong, je ne pense pas qu'il puisse vraiment influencer le prix courant des jeux indépendants. Ce n'est qu'un élément parmi d'autres, il faudrait que des centaines de jeux indépendants proposent une quantité massive de contenu à bas prix pour faire évoluer le marché. Cela semble d'autant plus hypothétique que nous ne savons même pas quelle est l'ampleur du jeu ! »
Avec Silksong, Team Cherry a choisi la voie de l’accessibilité plutôt que celle du profit maximal. Une décision qui assure sans doute un accueil chaleureux du public et qui sécurise le succès, mais qui laisse les créateurs indépendants avec une question brûlante : comment convaincre les joueurs qu’un jeu peut valoir plus que 20 € ?










