Dans un paysage vidéoludique dominé par les productions anglo-saxonnes et japonaises, le succès à la fois critique et commercial de Clair Obscur: Expedition 33 et de sa bande-son a tout d’un phénomène. Plus encore, c’est la bande originale du jeu qui attire désormais l’attention internationale, avec plus de 33 millions d’écoutes sur les plateformes en à peine deux semaines, propulsant l’OST à la première place des classements Classical et Classical Crossover Albums du Billboard.
Ce rayonnement mondial met en lumière une œuvre musicale dense, poétique, qui s'affranchit des codes classiques pour mieux créer une identité sonore propre, entre baroque réinventé, jazz, métal, et chanson. Une bande originale aussi ambitieuse qu’éclectique, qui compte plus de 150 morceaux, disponibles sur YouTube, Spotify et Apple Music, et qui trouve toute sa puissance émotionnelle une fois replacée dans le contexte du jeu.
Lorien Testard et Alice Duport-Percier, une collaboration au cœur de la musique et du jeu vidéo
Le monde de Clair Obscur : Expedition 33 repose sur une esthétique unique, une Belle Époque transfigurée par le surréalisme et la science-fiction. C’est dans cet univers onirique que s’inscrit la musique de Lorien Testard. Dès les premières notes, on y décèle une volonté de conjuguer héritage et modernité.
À ses côtés, la soprano Alice Duport-Percier insuffle une grâce baroque à certaines compositions, notamment par ses interventions vocales inspirées de son travail au sein du groupe Les Kapsber’girls.
La collaboration entre Testard et Duport-Percier est née d’un heureux hasard. Le compositeur découvre la chanteuse grâce à ses performances avec le Grissini Project, trio lyonnais spécialisé dans les reprises de musiques de jeux vidéo. Séduit par sa voix et son approche, il lui propose non seulement d’interpréter certains morceaux, mais aussi de co-composer les lignes vocales, en particulier celles des chansons souvent écrites dans une langue inventée dans l'optique de préserver une portée universelle.
Clair Obscur : une bande-son qui restera dans les mémoires
Pour Lorien Testard, la musique ne devait pas simplement accompagner les événements, mais les exprimer : « Il était vraiment important que les thèmes de combat soient guidés par l’environnement, les ennemis et l’histoire. Je voulais qu’ils s’intègrent naturellement dans le monde. » explique-t-il dans une interview accordée à RPGFan.
La bande originale ne sert donc pas de simple accompagnement. Elle est au cœur du projet artistique. Ce parti pris place Clair Obscur dans la lignée de jeux où la musique porte une fonction narrative essentielle. On pense à NieR: Automata, dont les motifs musicaux évoluent selon les perspectives des personnages, ou encore Hollow Knight ou Journey, qui ont montré comment des bandes originales subtiles, composées autour de thèmes récurrents et d’une instrumentation ciblée, peuvent renforcer l’identité d’un monde sans jamais l’envahir.
La musique a cette capacité rare de s’imprimer dans la mémoire avec une force que peu d’autres formes d’art égalent. Dans un jeu vidéo, elle agit comme un liant invisible entre le joueur et le monde qu’il explore. Elle renforce l’immersion, accompagne les émotions, donne du relief aux silences, du poids aux instants forts. Dans les grandes œuvres vidéoludiques, ce n’est jamais un simple fond sonore : c’est une composante essentielle de la narration.
C’est cette fonction que remplit la bande originale de Clair Obscur : Expedition 33. Pensée comme une œuvre à part entière, mais indissociable du jeu lui-même, elle capte l’esprit du récit, la mélancolie des personnages et la beauté étrange de l’univers. À l’instar des musiques de bien d'autres jeux, certaines compositions de Clair Obscur ont déjà commencé à circuler en dehors du jeu, dans les vidéos de fans, les playlists, les reprises. Et il est fort probable qu’elles s’installent durablement dans les cœurs et les oreilles des joueurs.







