
En pleine expansion, le marché du gaming nomade tisse sa toile avec de plus en plus d'efficacité. La diversité des supports lui permet de devenir un outil indispensable du quotidien. En 2012, il atteindra un rythme de croisière que personne ne lui aurait prédit il y a de cela 5 ans à peine. Le pari n'était pas gagné, mais aujourd'hui l'offre dépasse le cadre de l'anecdotique. L'objet est partout, et peut revêtir plusieurs formes ou arborer une interface singulière. Sa fonction multi-tâches a emboîté le pas à des appareils qui, avant lui, avaient des fonctionnalités bien plus imperméables, des appareils qui ont écrit l'histoire du jeu vidéo nomade et dont les noms, encore aujourd'hui, sonnent clairement dans la mémoire des utilisateurs.
Première génération
Parler de jeu nomade c'est bien, mais il faut rendre à César ce qui appartient à César. À eux donc les lauriers et la primeur de voir leurs noms briller au sommet de l'affiche. Au début, un peu après le verbe tout de même, il y avait Nintendo et Sega, deux géants du jeu vidéo qui se tiraient la bourre à coup de franchises légendaires au début des années 90 pour savoir qui allait être le patron de la cours de récré. C'était un peu la guerre des boutons, aussi féroce que celle que se livrent encore aujourd'hui Coca et Pepsi, les bulles en moins. La Gameboy, première du nom, sortait en France à la rentrée des classes de l'année 1990. Petit appareil au rendu monochrome affublé d'une croix directionnelle et de deux petits boutons, la machine de Nintendo entrait dans les foyers français pour devenir un gadget incontournable auprès des gamins qui découvraient émerveillés cette nouvelle technologie que le pays du soleil levant exportait par bateaux entiers à travers le monde. La première année Nintendo vendra 1,4 million de consoles sur le marché français, une preuve de l'attachement que les Français avaient déjà pour la firme nippone, un amour qui ne sera jamais désavoué concernant le marché portable.
A travers la Gameboy, c'est toute l'architecture d'un modèle économique qui se met en branle pour la diffusion de matériels nomades liés au jeu vidéo : une machine unique qui sert de base et des cartouches au format propriétaire qui permettront de jouer sur la console à un maximum de jeux et ce, n'importe où à condition d'avoir des piles et une bonne luminosité. A quelques encablures du concept du Game & Watch, que le géant nippon a défendu pendant les années 80, et qui passera à la trappe comme une antiquité une fois sa petite sœur devenue star des rayons de jouets des supermarchés. La Gameboy permettait de renouveler une idée de design en lui donnant l'occasion d'être un vecteur plus prégnant d'un catalogue de softs en perpétuelle évolution. Une innovation qui met le secteur recherche et développement de l'entreprise au service de sa croissance horizontale, en créant le marché qui permettrait l'essor de sa diffusion. L'implication pour le marché du jeu vidéo sera telle que beaucoup prendront le train en marche.

En Juin 1991 Sega lui emboîtait le pas et sortait sa Gamegear, une petite révolution car la portable 8 bits offrait au joueur la possibilité de jouer à des jeux en couleurs : incroyable. C'est un argument qui peut prêter à sourire aujourd'hui, mais reste que ce sera la dernière tentative de Sega de vouloir s'aligner sur le marché nomade, sa petite protégée ne remportant qu'un succès d'estime auprès des joueurs, loin de l’insolente réussite de sa concurrente directe qui s'écoulera en tout et pour tout à 118 millions d'unités en une petite dizaine d'années. Une preuve peut être aussi déjà à cette époque que le public n'était pas forcément attaché aux seules évolutions technologiques d'un appareil, lui préférant d'abord un objet qui avait su se renouveler ou s'inventer et renouveler une idée du marché avant lui, à un prix bien plus abordable de surcroît. Un problème d'image donc et non un échec marketing, une différence sémantique qui pourrait expliquer que la valeur que le consommateur accorde à ces objets nomades est plus représentative de l'idée qu'il se fait du concept même de cet objet en question, en fonction de sa marque et de son histoire.

A ce petit jeu la Gameboy et ses itérations enterreront purement et simplement leurs concurrentes. Car ce n'est pas seulement Sega qui se cassera les dents sur ce marché en pleine émergence, dans la liste des déçus on évoquera aussi la présence d'Atari avec sa Lynx qui n'aura jamais réussi à percer, Nec avec sa PC Engine GT ou encore SNK avec sa Neo Geo pocket qui, chacune à leur niveau, n'ont jamais trouvé de réconfort dans la publication de leurs résultats ou très marginalement sur des marchés fermés, comme le marché japonais par exemple.

Les années 90 ont matérialisé un avenir possible pour le support nomade. Mieux elles ont permis au concept de perdurer tout en créant des voies de développement intéressantes pour les éditeurs et les créateurs de jeux. 20 ans plus tard, au vu de son succès et cela bien avant d'atterrir sur la console de Nintendo, le Tetris de la Gameboy est en terme de conception, de minimalisme et de réalisation, une interface qui a ouvert la voie au marché du jeu sur matériel portable. Une approche du jeu, simple, effective et directe qui sera aussi un emblème de cette période concernant le jeu nomade, un succès jamais démenti, puisqu'en 2007 par exemple Tetris sera le jeu le plus vendu sur iPod, un fait pas si anodin...




