Photo : Steeelback
L'année dernière il n'y avait aucun doute possible et on ne pouvait pas faire plus hype que les matchs entre Solary et la Karmine Corp, les deux structures les plus populaires de France. Même si sportivement, on pouvait trouver mieux, l'affiche restait belle et les communautés s'en donnaient à cœur joie avec le "Classico". Depuis, cette appellation d'origine contrôlée a été partiellement reniée, notamment parce que les tensions étaient trop électriques sur les réseaux. Mais la confrontation continue de passionner et plus de 200 000 viewers ont répondu présent sur les streams cumulés. Avec un tel engouement, difficile de ne pas offrir un statut spécial à ce match pas comme les autres.
Et alors que sur le papier, la Karmine Corp semblait largement favorite après un mercato impressionnant (recrutement de Rekkles, prolongation de Saken et Cabochard...) c'est au final la structure de Tours qui l'a emporté avec la manière. Comment Solary a-t-elle réussi à plonger KC dans le doute ?
L'état d'esprit : normalisation synonyme de manque de motivation ?
Avant même que ne débute le match, Kamel et la Karmine Corp ont voulu calmer le jeu, reniant partiellement l'appellation de "Classico". On ne connait pas les raisons exactes qui ont motivé l'équipe à changer son fusil d'épaule alors qu'elle avait énormément surfé sur cette vague en 2021. Publiquement, Kameto a regretté les tensions et provocations qui ont parfois mal tourné sur Twitter. Il faut également souligner que KC était en quête de légitimité l'année dernière alors que maintenant, elle souhaite entrer dans une nouvelle dimension pour éventuellement rejoindre le LEC. La Karmine n'a plus vraiment de temps à perdre avec Solary et ne souhaite pas ternir son image. Elle a des nouveaux compagnons de jeu (l'équipe d'Ibai et Piqué) et vise bien plus haut. Par conséquent, elle a normalisé au maximum ce match, qui ne serait qu'un match parmi les autres. Sur les réseaux, on a d'ailleurs vu une communication bien moins agressive.
Mais cette normalisation était en réalité très déséquilibrée. Parce que chez Solary, on n'a pas totalement abandonné ce storytelling de Classico et une personne comme Narkuss a notamment insisté sur l'importance de ce match. Au niveau compétitif, on sait à quel point la motivation est importante et Solary a peut-être pris un ascendant psychologique dès sa préparation.
La draft : la responsabilité de Striker est engagée
Pour certains, 50 % d'un match se joue à la draft, cette fameuse phase de pick & ban qui permet de constituer la composition la plus équilibrée et optimale possible. Avec du recul, il est évidemment facile de désigner la draft des Solary comme la meilleure. Mais au-delà du résultat, il est vraiment compliqué de comprendre ce qu'a voulu faire coach Striker... Ce dernier a permis à ses rivaux de jouer une composition "cancer" qui sied parfaitement aux qualités des joueurs. Avec le combo longue portée Xerath/Jhin, bien supporté par l'engage semi-globale d'un Ornn, on savait avant même que le match commence qu'une telle combinaison poserait problème. Ça n'a pas raté et les inséparables Djoko/Steeelback ont souligné en interview qu'ils étaient très à l'aise avec ce type de composition full scaling et full late game. Solary avait déjà draft une combinaison similaire en ouverture contre Vitality.Bee et l'année dernière on voyait déjà très régulièrement le Xerath de Scarlet.
Si les Solary ont réussi à sortir une draft remplie de synergie, on ne peut pas en dire autant pour KC. Les casters d'OTP ont vite fait remarquer que la lane Tristana/Bard ne faisait pas vraiment sens et qu'il était compliqué de all-in avec ces deux champions. De plus, l'absence de frontlane et d'engage a beaucoup fait défaut à l'équipe. Alors que les carry adverses restaient à l'abri, la Karmine n'avait pas les armes pour les attraper.
L'exécution : il avait de la place mais la Karmine a trop cafouillé
Ceux qui ont regardé la partie savent que la Karmine Corp avait de la place pour s'imposer. L'équipe a rapidement pris les devants dans la partie et elle a compté une belle avance en milieu de partie (près de 7 000 golds d'écart). Pendant près de 30 minutes, tout marchait comme sur des roulettes. Cabochard martyrisait Kio en toplane et atteignait le Flame horizon de +100 CS. Les tours tombaient les unes après les autres et Rekkles en pleine confiance s'offrait le luxe de split push avec sa Tristana comme au bon vieux temps. Mais KC a sûrement joué trop tranquille et il a manqué un gros coup d'accélérateur. C'était trop mou et trop indécis et plusieurs joueurs (Cabochard, Rekkles) ont commis des petites erreurs de positionnement qui ont pesé lourd dans la balance. En plus de donner des précieux golds qui ont permis à Solary de survivre, chaque erreur faisait perdre du tempo et ralentissait le jeu.
La Karmine Corp a petit à petit perdu pied et personne n'a réussi à prendre ses responsabilités pour sonner la charge. Avec 7 000 golds d'avance, il aurait été aisé de forcer un fight autour d'un Nashor. Mais KC n'a pas trouvé l'ouverture. Alors que la base de Solary était ouverte (perte de l'inhibiteur bot) un backdoor était envisageable mais les joueurs se sont montrés trop hésitants. Avec un Bard, on aurait bien aimé voir plus d'ultimate agressifs. Mais Hantera a été trop passif et trop patient. Au final, l'exécution ne fut pas au rendez-vous et on se demande s'il ne manque pas un leader dans l'équipe. Rekkles, toi qui a autant d'expérience, tu ne voudrais pas passer une petite soufflante ?